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Visite du secrétaire d’Etat chargé de la relance et du président du PS

Le 15 novembre, les 3 partenaires CarmeuseJohn Cockerill et ENGIE ont eu l'honneur d'accueillir Thomas Dermine (secrétaire d’Etat chargé de la relance) et Paul Magnette (Président Parti Socialiste)  sur le projet Columbus à la centrale ENGIE d'Amercoeur. Des journalistes de L’Echo et de La Nouvelle Gazette les ont accompagné lors de la visite.

Des journalistes de L’Echo et de La Nouvelle Gazette les ont accompagné lors de la visite.

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Article L’Echo | La capture du CO2, solution miracle pour décarboner l'industrie?

Capturer le CO2 présent dans les fumées rejetées par l’industrie – et même dans l’air –, c’est possible. Et les conditions sont aujourd’hui réunies pour que la pratique se déploie. Mais quel en est exactement le potentiel?

Au hit-parade des plus gros émetteurs de CO2 de la planète, c’est l’industrie qui brigue la première place. Et de loin. C’est pourquoi, à l’heure du réchauffement climatique, sa décarbonation s’est hissée au rang de priorité absolue. Mais réduire l’impact environnemental de l’industrie n’est pas une mince affaire. Certes, l’électrification croissante de certains usages et l’utilisation grandissante de l’hydrogène vert (produit à partir d’énergie renouvelable, NDLR) ou de carburants synthétiques à l’origine des processus permettront de réduire l’empreinte carbone des industriels, mais ces développements, par ailleurs tributaires de l’essor des énergies renouvelables, ne représentent qu’une partie de la solution. En effet, dans l’industrie, toutes les émissions de CO2 ne peuvent pas être évitées. Certaines découlent directement de la production et des matières premières, notamment dans les secteurs du verre, de l’acier, du ciment, de la chaux ou encore de la production d’électricité à partir de gaz. Bonne nouvelle, ce CO2 rejeté peut en réalité être capturé et servir de matière première à la réalisation de plusieurs produits, aidant à leur tour à la décarbonation de l’industrie. Mais avant que la capture carbone ne puisse réaliser son destin de «chaînon manquant» dans ce cercle vertueux industriel, du chemin reste à parcourir.

Plusieurs options

Techniquement, capturer le CO2 n’est ni difficile, ni nouveau. Juste cher. «Il existe deux catégories de capture, soit directement au niveau de fumées industrielles, soit dans l’air, où le CO2 est automatiquement beaucoup plus dilué», signale Lionel Dubois, Chercheur senior à l’Université de Mons et Coordinateur scientifique et de recherche en capture et utilisation du CO2. «Pour la capture dans les fumées (le cas qui nous intéresse ici, NDLR), plusieurs technologies existent, mais la plus mature consiste à utiliser un solvant chimique afin qu’il se lie aux molécules de CO2 avant l’expulsion des fumées à l’atmosphère. Le solvant est ensuite régénéré pour libérer le CO2, ce qui demande une certaine quantité d’énergie», explique-t-il. Le défi réside plutôt dans l’utilisation qui peut être faite du CO2 récolté, étant donné que les infrastructures de transport et de stockage de celui-ci ne sont pas encore suffisamment développées. Chez le producteur de chaux belge Carmeuse, on a décidé de s’associer au groupe d’ingénierie John Cockerill et à l’énergéticien Engie afin de capturer et concentrer le CO2 rejeté par un nouveau type de four, pour ensuite le combiner à de l’hydrogène vert produit grâce à un électrolyseur de 75 MW. À la clé de cette combinaison, la production de «e-methane», soit un gaz renouvelable pouvant être directement injecté dans le réseau gazier ou bien servir d’alternative aux carburants utilisés dans l’industrie et les transports. Le projet annoncé en 2020 et baptisé «Colombus» est d’ailleurs dans
les temps pour être opérationnel d’ici 2025; et les candidats à l’utilisation du méthane produit ont été trouvés. Il deviendra alors le premier au monde à combiner les expertises de trois acteurs de ce type pour parvenir à produire du gaz synthétisé à partir du CO2 grâce à l’intervention de l’hydrogène vert. D’autres devraient suivre dans son sillage, mais la barrière «coût» reste importante.

Sens économique

«Aujourd’hui, sans soutien public, ce type de projet n’est pas viable», lance Jean-Yves Tilquin, directeur de la cellule R&D chez Carmeuse. Avec un investissement initial estimé à 160 millions d’euros, il est clair que Colombus nécessite l’intervention de plusieurs acteurs. «Nous avons transmis un dossier de subside auprès de l’Innovation Fund de la Commission européenne et nous avons obtenu le support des pouvoirs publics régionaux. C’est la seule façon de combler le trou qui existe entre le prix de revient du gaz produit et le prix du gaz sur le marché», appuie-t-il. Selon lui, la filière gagnerait à voir la législation autour du CO2 se simplifier. Par ailleurs, la disponibilité de l’énergie renouvelable reste un défi important pour parvenir à utiliser le maximum de CO2 capturé. En raison du stade de développement des unités de production renouvelable et de leur intermittence, ainsi que des trop faibles capacités de production d’hydrogène vert par rapport aux volumes de CO2 capturés, d’autres projets de capture carbone ont pour finalité l’enfouissement géologique du CO2. «La prochaine étape du développement de la filière carbone est son utilisation telle que dans la minéralisation du CO2. Cela permettrait de le stocker pendant plusieurs milliers d’années, voire de le réutiliser pour fabriquer des matériaux de construction, mais nous en sommes encore au début»,

pointe Lionel Dubois.

Moment clé
Malgré des investissements initiaux conséquents et le manque actuel d’électrons verts disponibles, l’environnement semble propice au développement de la filière. «On est à un réel tournant. On commence à voir les premières grosses unités de production industrielle de gaz synthétiques et le timing de l’appel à projets lancé par l’Europe est aligné. 2022 sera une année charnière, notamment pour le développement des infrastructures de transport d’hydrogène et de CO2», souligne Jean-Yves Tilquin. Et puis la flambée des prix de la tonne de CO2 sur les marchés est de bon augure pour les industriels adeptes de la capture. «Le coût de la capture dépend de chaque installation. Cela peut aller de 30 à 40 euros la tonne jusqu’à 70 à 80 euros. Elle est
dès lors devenue compétitive vis-à-vis des prix des quotas d’émissions (proches de la barre des 100 euros dernièrement, NDLR)», épingle Lionel Dubois. On le comprend, la capture carbone n’est plus loin de déployer ses ailes. Même si certains freins subsistent, la technologie autrefois impayable se rentabilise, au point d’aligner les objectifs environnementaux sur les objectifs économiques. Au monde politique, désormais, de faciliter la vie des industriels pour, enfin, transformer ce CO2 «inévitable», en gaz synthétique providentiel. Et boucler la boucle pour l’industrie. Le résumé
La capture carbone émerge comme solution pour décarboner l’industrie , notamment pour les émissions «inévitables» de CO2.
En Belgique, le projet unissant Carmeuse à John Cockerill et Engie fait office de pionnier dans la synthèse du méthane à partir de CO2 et d’hydrogène vert .
Les coûts d’investissement et la disponibilité de l’énergie renouvelable restent des freins au développement de la filière.